La résiliation des contrats de consommation en quelques clics

Aux fins d’application du nouvel article L.215-1-1 du Code de la consommation[1], le décret n°2023-417 du 31 mai 2023 relatif aux modalités techniques de résiliation des contrats par voie électronique[2] vient d’être adopté.


Objectif: permettre au consommateur et au non-professionnel de résilier leurs contrats, par une voie électronique simplifiée, en seulement  « 3 clics ».

Date d’entrée en vigueur: 1er juin 2023

Pour quels contrats ?

Ces nouvelles dispositions s’appliquent à :

    • tous les types de contrats d’abonnement, de services ou de location tels que téléphonie, internet, gaz, électricité, salle de sport, journaux et médias en ligne, site de rencontre etc.) ;
    • en cours ou futurs ;
    • conclus par un consommateur ou un non-professionnel (lequel peut donc être une personne morale n’agissant pas à des fins professionnelles[3]);
    • que le contrat ait été conclu par la voie électronique ou par tout autre moyen (i.e. papier dans un point de vente physique, s’agissant de services de téléphonie mobile ou d’internet par exemple) dès lors, dans ce dernier cas, que le professionnel permet la conclusion en ligne d’un contrat au jour où le consommateur sollicite la résiliation.

A noter toutefois, que s’agissant des contrats d’assurance (auto, habitation etc.) et de prévoyance, un dispositif similaire, au bénéfice des souscripteurs, est mis en place avec le décret n°2023-182 du 16 mars 2023[4] en vigueur, lui aussi, au 1er juin 2023.

Quelles sont donc concrètement les fonctionnalités à mettre en œuvre pour le professionnel ?

1er clic : « résilier votre contrat »

Le professionnel doit veiller à intégrer une fonctionnalité facilement accessible, portant la mention « résilier votre contrat » ou une formule analogue dénuée d’ambiguïté affichée en caractères lisibles, sur l’interface en ligne (site web ou application mobile) permettant la conclusion des contrats.

Cette fonctionnalité « pourra » – mais à notre sens « devra », au risque de vider la nécessaire information du consommateur – « indiquer de manière lisible et compréhensible, les informations portant sur les conditions de la résiliation des contrats notamment, le cas échant, l’existence d’un délai de préavis, d’une indemnité de rupture ainsi que les conséquences de la résiliation. »

Le professionnel devra toutefois s’abstenir d’imposer au consommateur, à ce stade de la notification de la résiliation de son contrat, la création d’un compte/espace personnel pour accéder à la fonctionnalité de résiliation, sans préjudice toutefois de lui demander d’utiliser à cette fin son compte personnel s’il a été créé antérieurement.

Quelles rubriques devront y figurer ?

Devront être accessibles au sein de cette fonctionnalité les éléments permettant au consommateur de s’identifier tels que :

    • Nom, prénom ou dénomination/raison sociale ;
    • Adresse électronique ou postale, à laquelle le professionnel pourra confirmer la réception de la notification de la résiliation ;
    • Les références du contrat ;
    • La date de résiliation souhaitée, sous réserve des dispositions légales ou contractuelles ;
    • Numéro de téléphone.

Le consommateur pourra compléter ces informations si le professionnel n’a pas prérempli ces rubriques à charge du consommateur d’en confirmer l’exactitude ou de les modifier.

Une rubrique spécifique devra également être intégrée pour les cas de résiliation anticipée soumis à un motif légitime, précisant ce motif et le justificatif à produire.

2ème clic : La confirmation du récapitulatif de la résiliation et des éléments fournis

Avant la résiliation définitive le consommateur devra pouvoir accéder à une page récapitulant ces informations.

3ème clic : La confirmation de « la notification de résiliation »

Le consommateur pourra confirmer et finaliser sa démarche en cliquant sur la fonction « Notification de la résiliation » ou présentée par une formule analogue dénuée d’ambiguïté, affichée en caractères lisibles accessible à partir de la page récapitulative.

Enfin, le professionnel devra confirmer la réception de la notification du consommateur, en l’informant sur un support durable et dans un délai raisonnable, de la date de fin de contrat et des effets de la résiliation.

***

Attention : La DGCCRF a fait savoir que ses services seront vigilants quant à la bonne application de cette nouvelle obligation par les professionnels.

Elle laisse toutefois aux professionnels, jusqu’au 1er septembre 2023 pour se mettre en conformité[5]. Passé ce délai, le professionnel qui manquera à cette obligation sera passible d’une amende administrative pouvant aller jusqu’à 15 000 € s’il s’agit d’une personne physique et jusqu’à 75 000 € s’il s’agit d’une personne morale.[6]

Morgane LE LUHERNE & Jérémy SIMON

Avocats – Département droit économique/numérique

 

[1] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000046190107

[2] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047613963

[3] Article liminaire du Code de la consommation 

[4] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047314374

[5] https://presse.economie.gouv.fr/01062023-cp-entree-en-vigueur-de-la-resiliation-en-ligne-des-contrats-en-trois-clics/

[6] Article L.241-3-1 du Code de la consommation

Contrats informatiques : obligation de coopération du client et obligation de conseil du prestataire

Devoir de conseil du prestataire et obligation de coopération du client dans les contrats informatiques.

Par un arrêt du 5 juin dernier[1], la Cour de cassation a eu l’occasion de réaffirmer que le client d’un prestataire informatique est tenu de collaborer avec celui-ci, cette obligation de coopération faisant « nécessairement » partie du champ contractuel.

Dans cette affaire, une société qui diffusait, en particulier, des articles de sports sur internet avait confié la refonte de son site internet à un prestataire informatique. Par la suite, le client refuse de procéder au règlement du solde de la facture du prestataire en raison de prétendues inexécutions contractuelles.

Devant les juridictions du fond, le client sollicitait la résolution du contrat informatique et la restitution des acomptes versés au prestataire. La Cour d’appel d’Aix-en-Provence[2] refuse de faire droit à ces demandes au motif que le client n’avait pas répondu aux différentes demandes d’informations du prestataire et ce, alors même que les conditions générales de vente de ce dernier imposaient au client de collaborer activement[3].

Dans son pourvoi en cassation, la société cliente soutenait qu’elle n’était pas tenue à cette obligation de collaboration dès lors que le prestataire informatique ne démontrait pas lui avoir transmis les conditions générales de vente litigieuses sur lesquelles la Cour d’appel s’était fondée, de sorte que lesdites CGV ne pouvaient faire partie du périmètre contractuel.

La Cour de cassation rejette le pourvoi au motif que « la conception ou la refonte d’un site Internet exige la participation active du client tenu de fournir au prestataire les informations sans lesquelles celui-ci ne peut mener à bien sa mission, ce dont il résulte que cette collaboration fait nécessairement partie du périmètre contractuel. »

En d’autres termes, pour la Haute juridiction, l’obligation de coopération est inhérente aux contrats informatiques et s’impose, en toutes circonstances, aux parties de sorte qu’il n’est pas nécessaire qu’elle soit expressément stipulée dans les documents contractuels du prestataire informatique.

Si la Cour de cassation ne précise pas le fondement de ce devoir de collaboration, il n’est pas impossible qu’elle fasse, ici, implicitement application de l’article 1194 du Code civil lequel prévoit que « [l]es conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donne à l’obligation d’après sa nature. »[4]

Cet arrêt est l’occasion de rappeler les obligations de conseil et de coopération qui pèsent sur les acteurs des contras informatiques.

1. Les obligations pesant sur les prestataires informatiques

  • L’obligation d’information précontractuelle

Cette obligation figure désormais expressément à l’article 1112-1 alinéa 1er du Code civil qui dispose « celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant – sauf, selon l’alinéa 2, en ce qui concerne « l’estimation de la valeur de la prestation ».

En matière informatique, ce devoir impose au prestataire de fournir au client toutes les informations nécessaires et utiles pour lui permettre de s’engager en toute connaissance de cause et qu’il pouvait, compte tenu de ses compétences en la matière, légitimement ignorer. Il s’agit donc d’un devoir précontractuel d’information circonscrit à des informations portant sur le contenu et le matériel objet du contrat et nécessaire à la bonne compréhension du client.

  • L’obligation de conseil

L’obligation de conseil est, quant à elle, plus exigeante en ce sens que le prestataire se doit de se prononcer sur la solution la mieux adaptée aux besoins de ses clients, voire même de déconseiller à ces derniers les solutions inadéquates. Pour ce faire, il appartient au prestataire de se renseigner et de s’informer sur les besoins et la volonté de ses clients, y compris lorsque ces derniers sont des professionnels.

Il convient de souligner que cette obligation de conseil est de résultat quant à la réalité de la délivrance du conseil[5] mais est, en revanche, de moyen quant à la teneur et à la pertinence des conseils donnés[6]. Dans le premier cas, la responsabilité du prestataire sera engagée par la simple démonstration, par le client, que le conseil ne lui a pas été délivré. Dans le second cas, la responsabilité du prestataire ne sera retenue qu’à la condition que le client démontre une faute de son cocontractant laquelle pourrait être caractérisée par la délivrance d’un conseil erroné.

A titre d’exemple, les juridictions du fond ont pu condamner le prestataire informatique pour manquement à son obligation de conseil :

  • lorsqu’il n’informe pas le client sur les spécificités et limites du produit ou sur la complexité des développements logiciels spécifiques à réaliser et ce, même si le client exerce une activité dans le domaine informatique[7];
  • lorsqu’il n’a pas procédé à une étude suffisante des besoins de son client et lui a fourni des progiciels inadaptés à son activité[8];
  • lorsqu’il n’informe pas son client sur les limites de sa prestation et les fonctionnalités limitées du logiciel vendu[9].

Le devoir de conseil peut également impliquer pour le prestataire une obligation de mise en garde visant à alerter le client sur les dangers que représente l’opération envisagée ainsi que sur les éventuelles contraintes techniques de celle-ci.

2. L’obligation de coopération du client

L’obligation d’information et de conseil du prestataire a pour corollaire une obligation de collaboration et de coopération du client consacrée par la jurisprudence[10] et en vertu de laquelle le client doit fournir au prestataire les moyens nécessaires à la parfaite exécution du contrat informatique.

Pour apprécier la conformité de l’exécution de la prestation informatique, la qualité de la prestation doit être regardée différemment selon que le client a ou non collaboré à son résultat. Si l’exécution n’est pas conforme en raison de l’absence de collaboration du client, cette non-conformité pourra, en principe, ne pas être imputée au prestataire.

Cette obligation de collaboration et de coopération du client intervient au stade de la négociation du contrat mais également pendant l’exécution du contrat.

Ainsi, lors de la négociation du contrat, le client doit notamment recueillir toutes les informations utiles concernant la prestation informatique souhaitée et préciser ses attentes[11], spécifier les objectifs précis à atteindre[12].

Lors de l’exécution du contrat, le client doit faire preuve d’une implication suffisante dans la réalisation de l’opération informatique, indiquer les spécificités de fonctionnement de son entreprise[13] ou mettre en mesure le prestataire de respecter les délais contractuellement prévus[14].

 

Reste que le degré d’intensité de l’obligation d’information du prestataire et de l’obligation de coopération du client variera en fonction des connaissances et des compétences de ce dernier.

En effet, lorsque le client est considéré comme profane en informatique ne disposant d’aucune compétence en la matière, l’obligation d’information du prestataire sera renforcée et l’obligation de coopération, quant à elle, atténuée[15].

S’il résulte de l’arrêt commenté que l’obligation de coopération s’impose au client, nous conseillons toutefois aux prestataires informatiques de rappeler systématiquement à leurs clients l’obligation générale de collaboration dont ils sont débiteurs mais également, de préciser les contours et l’intensité de cette obligation afin d’éviter d’éventuelles difficultés qui pourraient survenir dans l’exécution du contrat.

A titre d’exemple, il peut être demandé au client de fournir tout document nécessaire à la parfaite compréhension de ses besoins par le prestataire, de désigner un interlocuteur privilégié, d’assurer au prestataire un libre accès à ses locaux nécessaire à la bonne exécution du contrat, de participer de manière active à l’élaboration du projet informatique et surtout de participer à l’élaboration d’un cahier des charges précis.

Le cabinet peut vous accompagner dans la rédaction de vos contrats informatiques.

Morgane LE LUHERNEThomas ZANITTI

Avocats – Département Droit économique – Droit de l’informatique

 

[1] Cass. Com, 5 juin 2019, n°17-26.230

[2] CA Aix-en-Provence, 22 juin 2017, RG n°14/15881

[3] L’article 5 des conditions générales de vente du prestataire était rédigé ainsi : « Il collaborera avec le prestataire en vue d’assurer la bonne exécution du contrat, notamment en y allouant les moyens et le personnel nécessaire en répondant promptement aux interrogations du prestataire. ».

[4] Contrats Concurrence Consommation, n°10, octobre 2019 n°150

[5] Cass 1ère civ, 25 février 1997, n°94-19.685

[6] Cass. Com, 17 décembre 1991, n°90-13.557

[7] CA Paris, 17 novembre 2017, RG n°15/20024

[8] CA Limoges, 21 décembre 2015, RG n°14/01136

[9] CA Paris, 16 octobre 2015, RG n°13/06759

[10] Cass. Com, 11 janvier 1994, n°91-17.542

[11] CA Pau, 8 juin 1994, RG n°93/1324 : Le client doit s’impliquer, assumer et dialoguer avec le prestataire

[12] Cass. Com, 7 janvier 1997, n°94-16.558

[13] Cass. Com, 10 janvier 2018, n°16-23.790

[14] CA Aix-en-Provence, 2 mars 2017, RG n°13/22835

[15] Cass. Com,  19 février 2002, n°99-15.722

Blockchains, cryptoactifs et ICO

Blockchains, cryptoactifs et ICO (1/2)

L’année 2018 a vu le législateur et les autorités de régulation se saisir des nombreuses questions juridiques que posent le développement des technologies blockchain (chaines de blocs), l’objectif étant de développer un environnement juridique suffisamment souple et stable pour ne pas brider le développement de ces technologies, tout en apportant une régulation suffisante afin de générer la confiance indispensable des investisseurs.

Les offres au public de jetons plus connues sous leur anglicisme d’ICOs (Initial Coin Offerings) sont des opérations de levée de fonds fonctionnant par l’émission de jetons (token) contre des crypto-monnaies (Bitcoins, Ethers…) ou des monnaies classiques. En France, en 2018, les principales ICOs ont déjà permis de lever 500 millions d’euros.[1]

A la suite des rapports[2], notamment de l’Autorité des Marchés Financiers[3] (AMF) sur les enjeux de la blockchain, le projet de loi PACTE adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale le 9 octobre dernier et soumis à l’aval du Sénat fin janvier 2019, dessine le statut et le cadre juridique des ICOs.

L’article 26 du projet de loi définit un jeton comme « tout bien incorporel représentant, sous forme numérique, un ou plusieurs droits pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférés au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé permettant d’identifier, directement ou indirectement, le propriétaire dudit bien »

Les jetons émis peuvent être de nature très variée et ont été classés par l’AMF en deux grandes catégories qui suivent un traitement juridique distinct :

  • Les jetons octroyant des droits politiques ou financiers (droit de vote, dividendes…), qui s’assimilent à des instruments financiers et dont l’émission resterait soumise à l’obligation de dépôt d’un prospectus visé par l’AMF.
  • Les jetons d’usage (utility tokens), qui donnent accès à un service au sein du projet à financer, à un tarif ou à des conditions privilégiées.

Dans la mesure où, les offres au public de jetons d’usage s’inscrivent difficilement dans un cadre classique de régulation, le projet de loi PACTE propose un régime optionnel de visa délivré par l’AMF aux acteurs qui souhaiteraient réaliser une telle offre.

La procédure de visa a pour dessein de rendre plus attractive « les offres « vertueuses » qui ne sont ni des escroqueries, ni des arnaques manifestes, dans une logique de labellisation. »[4] 

Le visa serait conditionné, en particulier, à :

i) l’établissement par l’émetteur d’un document d’information (white paper) destiné à donner des informations utiles au public sur l’émetteur. Ce document devra présenter un « contenu exact, clair et non trompeur » et permettre de « comprendre les risques afférents à l’offre ».

ii) l’émission par une personne morale domiciliée en France ayant mis en place tout moyen (i.e. un séquestre) permettant le suivi et la sauvegarde des actifs recueillis dans le cadre de l’offre.

Le règlement général de l’autorité des marchés financiers (RGAMF) viendra détailler le contenu qui devra figurer dans ledocument d’information. Peut-être, le RGAMF détaillera-t-il notamment les outils d’identification et de connaissance du client (Know Your Customer – KYC, procédure exigée par la réglementation en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme). En effet, les transactions en crypto-actifs impliquent, par nature, un grand degré d’anonymat.

Or, à ce stade, si le projet de loi PACTE transpose les exigences européennes[5] en matière de lutte contre le blanchiment applicables au commerce de crypto-actifs, il ne contient aucune disposition et méthode précise sur ce point.

Si l’article 26 prévoit que les sociétés initiatrices d’ICO titulaires d’un visa délivré par l’AMF auront accès à un compte ouvert par la caisse des dépôts et consignations (CDC) en dernier recours, en cas de refus d’ouverture d’un compte par les banques, cet amendement a toutefois été adopté contre l’avis du gouvernement et de la CDC.

Pourtant, ce point revêt une importance cruciale pour le développement de ce type d’opérations sur le territoire national dans la mesure où les sociétés initiatrices d’ICO se heurtent au refus des établissements bancaires d’ouvrir des comptes en raison de leurs obligations en matière de lutte contre le blanchiment.

En attendant l’adoption définitive du projet de loi PACTE prévue au printemps 2019, nous vous proposerons dans un second volet de faire un point sur les dispositions comptables et fiscales applicables aux crypto-actifs.

Morgane Le LuhernePierre Gauchard AVOCATS ASSOCIES

Article Publié dans l’Informateur Judiciaire n°6923 du 25 janvier 2019


[1] Rapport d’information AN Blockchains 12/12/2018

[2] Rapports  Landeau 4/07/2018  France Stratégies 21/06/2018

[3] Consultation AMF 22/02/2018

[4]  op.cit. Rapport du 12/12/2018

[5] Directive UE 2018/843 du 30 mai 2018

Brève : Loi PACTE et levées de fonds en ICO

ICO Cabinet Avocats Nantes Kacertis Avocats

L’article 26 de la loi PACTE (plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) vient d’être adopté ce mercredi 12 septembre par la Commission spéciale de l’Assemblée Nationale.

Cet article a pour objet de créer le cadre juridique des levées de fonds en cryptomonnaies.

En d’autres termes, un cadre juridique nouveau, et totalement inédit en Europe, a vocation à être créé pour les émissions de jetons des ICO (Initial Coin Offering).

Droit Voisin : Presse vs/ GAFA

Cabinet Avocats Nantes Kacertis Avocats

Le Parlement Européen lors de sa séance plénière du mercredi 12 septembre dernier a adopté la réforme européenne en matière de droit d’auteur[1].

La Directive prévoit, notamment :

  • L’instauration d’un droit voisin pour les éditeurs de presse. L’article 11 vise à créer un nouveau droit voisin ce, afin de permettre aux journaux, agences, éditeurs de se faire rémunérer lorsque, typiquement, Google publie leurs contenus en ligne.

« De nos jours, les grandes plateformes utilisent des contenus de presse, gagnent beaucoup d’argent grâce à cela et les éditeurs ne touchent rien. L’Article 11 donne aux éditeurs de presse un droit de possession, de manière à ce qu’ils puissent réclamer une rémunération aux plateformes qui utilisent leurs contenus. Les liens hypertexte et les copies privées ne sont pas couverts par l’article 11 et peuvent être utilisés par toutes les plateformes, dont Wikipedia par exemple. » [2]

  • Une meilleure rétribution des créateurs de contenus. L’article 13 doit inciter certaines plateformes web comme YouTube à accorder une meilleure rétribution des créateurs de contenus, en négociant des accords avec les titulaires des droits. A défaut d’accord, les plateformes auront pour obligation d’empêcher leurs utilisateurs de publier des contenus protégés par le droit d’auteur.

Si le Directive doit faire l’objet d’un vote final début 2019 après négociations entre le Parlement, la Conseil et la Commission, il semble toutefois probable que ce vote ne soit qu’une formalité. Il appartiendra par la suite à chaque Etat Membre de transposer la Directive dans son droit national.

[1] http://www.europarl.europa.eu/news/fr/press-room/20180906IPR12103/droit-d-auteur-a-l-ere-numerique-le-parlement-adopte-sa-position

[2] Rapporteur Axel Voss http://www.europarl.europa.eu/news/fr/headlines/society/20180628STO06869/droit-d-auteur-nous-voulons-proteger-et-renforcer-les-droits-des-creatifs

Casse-Croûte #Juridique – Communication Digitale – 5 avril 2018

Cabinet Avocats Nantes Kacertis Avocats

Morgane LE LUHERNE, avocate associée, interviendra avec Doriana CHAUVET avocate au Barreau de Nantes et l’agence nantaise Intuiti sur le thème de la communication digitale.

Cet évènement, organisé par le Barreau de Nantes à la Maison de l’Avocat, sera l’occasion d’envisager les aspects juridiques de la communication digitale sous l’angle métier de la stratégie client.

Inscriptions : http://cassecroutejuridique.gipco-adns.com/

Au plaisir de vous y retrouver.

Pourquoi opter pour la signature électronique ?

Alors que le décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique précisant les conditions de validité de la signature électronique vient d’être publié au Journal Officiel, l’occasion nous est donnée de revenir sur ce procédé de signature dématérialisée ainsi que sur sa force probante.

Avant toute chose, il est nécessaire de répondre à une première question :

⇒ QU’EST-CE QU’UNE SIGNATURE ÉLECTRONIQUE ?

Une signature électronique n’est pas un « scan » d’une signature manuscrite, bien qu’elle y soit souvent assimilée à tort, mais la traduction logique et numérique d’une signature manuscrite.

Qu’il s’agisse d’une signature manuscrite ou électronique, on retrouvera nécessairement les trois éléments suivants : le signataire, le document et l’outil de signature.

En matière de signature électronique, l’outil est constitué par un logiciel qui créera le code valant signature et par le certificat de signature utilisé par le signataire pour signer l’acte (ex. code envoyé par mail ou sms, carte de clefs personnelles, clef USB, etc…).

Le règlement européen n° 910/2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur, dit « Règlement eIDAS »[1], entré en application le 1er juillet 2016, distingue la signature électronique dite avancée de la signature électronique qualifiée.

Concrètement, une signature électronique avancée doit répondre aux exigences suivantes :

  1. être liée au signataire de manière univoque ;
  2. permettre d’identifier le signataire ;
  3. avoir été créée à l’aide de données de création de signature électronique que le signataire peut, avec un niveau de confiance élevé, utiliser sous son contrôle exclusif et ;
  4. être liée aux données associées à cette signature de telle sorte que toute modification ultérieure des données soit détectable.

La signature électronique qualifiée, quant à elle doit non seulement répondre aux exigences susvisées mais en outre :

I) être créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié, c’est à dire un dispositif technique permettant de s’assurer :

  1. de la confidentialité des données de création de la signature ;
  2. que les données de créations sont uniques en ce sens qu’elles ne peuvent être pratiquement établies qu’une seule fois ;
  3. que ces données de création ne peuvent être trouvées par déduction ;
  4. de la protection desdites données de création contre toute falsification.

II) reposer sur un certificat qualifié de signature électronique, délivré par un prestataire de services de confiance qualifié.

Les dispositifs de création de signature électronique qualifiés et les certificats qualifiés de signature électronique ne peuvent être délivrés que par un prestataire de services de confiance qualifié par les organes compétents des Etats Membres permettant, notamment, de s’assurer du respect des exigences du Règlement eIDAS. En France, l’ANSSI (Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d’Information) est chargée de délivrer la « qualification » desdits prestataires.

⇒ QUELLE EST LA FORCE PROBANTE D’UNE SIGNATURE ÉLECTRONIQUE ?

Rappelons que l’article 1367 du Code civil[2] prévoit, notamment, que lorsque la signature est électronique « elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par Décret en Conseil d’Etat. »

Pour l’application de cet article, le Décret du 28 septembre 2017[3], entré en vigueur le 1er octobre dernier, vient préciser que dans la mesure où la signature électronique est qualifiée, sa fiabilité est présumée, jusqu’à preuve du contraire.

 A contrario, cela semble supposer que la signature électronique avancée ne bénéficie pas quant à elle d’une présomption de fiabilité, il appartiendra donc au prestataire utilisant ce type de signature de prouver en quoi son procédé est suffisamment fiable et sécurisé, si la valeur juridique de ce type de signature était contestée.

La signature électronique qualifiée apporte donc un gage de sécurité juridique, ainsi que le rappelle l’article 25 du Règlement eIDAS :

 « L’effet juridique d’une signature électronique qualifiée est équivalent à celui d’une signature manuscrite »

⇒ OUTRE LE GAGE DE SÉCURITÉ, POURQUOI OPTER POUR LA SIGNATURE ÉLECTRONIQUE ?

1. LA RAPIDITÉ

Le procédé électronique offre un avantage considérable en termes de rapidité en comparaison avec une signature manuscrite.

En effet, ce type de signature par voie électronique peut être entièrement réalisé à distance, ainsi :

  • l’identification du signataire peut être réalisée par l’envoi de pièces justificatives (copie de cartes d’identité, de justificatif de domicile, etc…) et/ou par le recours à des procédés de reconnaissance vocale, faciale, etc…, sans besoin d’une rencontre physique ;
  • la remise au signataire du certificat de signature nécessaire pour procéder à la signature de l’acte pourra s’effectuer à distance (ex. code envoyé par mail ou sms, carte de clefs personnelles, clef USB, etc…).

Là où la signature manuscrite d’un acte implique une rencontre physique entre les signataires personnes physiques pouvant être éloignées géographiquement ou une transmission par voie postale des exemplaires originaux de l’acte entre les signataires, le temps d’une signature par voie électronique se trouve réduit à quelques clics et permet d’économiser le temps et les frais de déplacement ou de transmission de nombreux actes.

2. LA FIABILITÉ

Pour satisfaire aux exigences du règlement eIDAS, un acte signé par voie électronique doit être, notamment, assorti d’un certificat de signature attestant (i) de l’identité du signataire, (ii) de la date de signature de l’acte et, (iii) de l’absence de toute modification ultérieure de l’acte.

Dès lors, contrairement à une signature manuscrite, la signature électronique garantit que l’acte n’a pas été anti- ni post-daté, et qu’aucune modification n’est intervenue depuis sa signature.

3. LA SIMPLICITÉ

La signature électronique est un gage de simplicité dans la mesure où l’acte original signé électroniquement pourra être dupliqué en autant d’exemplaires numériques originaux que nécessaire et stocké sur tout support numérique.

La conservation et l’archivage sur des supports électroniques par les signataires de ces actes signés par voie électronique en seront dès lors extrêmement simplifiés.

***

L’Acte d’Avocat Électronique 100% dématérialisé, créé en 2011[4], utilise un procédé de signature électronique qualifiée que le Cabinet d’Avocats KACERTIS propose et pratique régulièrement, à titre d’exemple, pour la signature d’actes de cession, de contrats ou bien encore de transactions.

Par Axelle LEROUX (Avocat) et Morgane LE LUHERNE (Avocat Associé)

[1] Le Règlement (UE) n°910/2014 du Parlement Européen et du Conseil du 23 juillet 2014, sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transaction électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE dit « eIDAS »,  a permis d’harmoniser le régime de la signature électronique sur le territoire de l’Union Européenne aux fins d’accroitre la confiance des citoyens européens à l’égard de ce procédé de signature

[2] Remplaçant l’article 1316-4 du Code Civil (dans les mêmes termes) à la suite de l’Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats

[3] Décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique

[4] Loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées (1)

NANTES DIGITAL WEEK : DROIT ET INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

La Nantes Digital Week, c’est la semaine de toutes les cultures numériques ; et pourquoi pas en ce compris la culture juridique ? Cet événement sera donc l’occasion de s’intéresser aux influences réciproques entre le droit et l’intelligence artificielle.

 

Voilà 60 ans que l’Intelligence Artificielle (IA) est devenue une discipline académique à part entière. Alors que l’IA relevait jusque là principalement du mythe déjà, en 1950, Alan Turing publie dans la revue Mind un article dans lequel il se demande si les machines peuvent avoir la capacité de penser et donc, être dotées d’une véritable intelligence. Il imagine alors de créer le célèbre test de Turing.[1]

Depuis lors, la recherche en la matière a subi des périodes de gel et de dégel. Devant la complexité de l’intelligence et privés de financement, les chercheurs s’en sont parfois détournés.

9 ans après la victoire de Deep Blue, premier système informatique de jeu d’échecs à battre Garry Kasparov, alors champion du monde en titre, ce fut au tour d’Alpha Go, en mars dernier, de battre le champion du monde de jeu de Go. En quelques années, les investissements dans l’IA sont devenus de plus en plus conséquents et cette dernière a fait des progrès considérables, notamment en matière de modélisation des données et d’apprentissage profond.

Désormais, sont présents dans notre environnement des robots, tels que Nao, Pepper, Jibo, Roomba ou Zenbo, des « assistants personnels » nommés Siri ou Cortana, des logiciels prédictifs, de reconnaissance vocale, faciale, mais également des véhicules autonomes ou semi-automnes etc.

L’IA est parfois considérée comme une nouvelle révolution industrielle, ses progrès touchent tous les secteurs, la médecine, l’éducation, l’industrie (notamment automobile), l’assurance ou le droit. A l’heure où certains envisagent une capacité de développement exponentielle de l’IA, notre société sera amenée à intégrer les bouleversements qui en résulteront, en dépassant les idées-reçues, fantasmes et autres scénarios catastrophes.

Aujourd’hui, l’IA a « la conscience d’un grille pain »[2]. Autrement dit, les robots et autres systèmes informatiques qui font partie de notre quotidien sont ce que certains appellent des IA faibles. A terme, il n’est toutefois pas impossible qu’il soit nécessaire d’établir une dichotomie entre cette IA faible et l’IA forte qui pourrait être dotée d’une réelle autonomie et d’une compréhension de ses propres raisonnements.

 

Outre les questions économiques, sociétales, éthiques ou sociologiques, la question de la place du droit dans cette révolution mérite de s’y attarder.

Alors, quel pourrait être le cadre juridique applicable à l’IA, en tant :

–      qu’objet de droit : est-il possible de protéger cette IA ? Quels sont les outils juridiques à la disposition des concepteurs ? Une protection est-elle nécessaire ? Le cadre actuel est-il suffisant ? Quel est le régime de responsabilité applicable à l’IA ? Qui est responsable si le système est défectueux ? etc.

–      que sujet de droit : certains auteurs recommandent de créer un statut propre à l’IA ou au robot, en lui reconnaissant une personnalité juridique. Dans la même veine, on peut également penser à l’IA créatrice et artiste, comme Magenta système informatique de Google qui a récemment créé seul un morceau de musique[3]. Est-il envisageable que ces IA soient titulaires de droits et, notamment, de droits de la propriété intellectuelle ?

 

En parallèle, l’impact de l’IA sur les professions juridiques ne peut être éludé. Des « robots- avocats » sont apparus aux Etats-Unis. Au-delà de l’effet d’annonce, Ross se contente en réalité de procéder à des recherches documentaires, il n’est donc pas prêt de remplacer l’avocat. Cela étant, l’IA ne pourrait-elle pas être un facteur de transformation du droit et de la justice ?

 

Le sujet est vaste et de nombreuses questions émergent à la lumière des développements croissants de l’IA. Nous tenterons, lors de la conférence débat du 23 septembre prochain, de répondre à certaines questions et d’apporter des clés de lecture et de réflexion.

 

Informations :

Conférence Débat organisée le 23 septembre 2016 à la Cité des Congrès, par le Cabinet KACERTIS AVOCATS et Jérôme Dupré, Co-fondateur de Case Law Analytics.

Interviendront Morgane Le Luherne Avocate Associée au sein du Cabinet KACERTIS et Jérôme Dupré, Co-fondateur de Case Law Analytics.

http://www.nantesdigitalweek.com/evenement-2016/droit-intelligence-artificielle/#.V9aTCMfLH04

Pour s’inscrire : https://www.eventbrite.fr/e/billets-droit-et-intelligence-artificielle-26177898800

[1] « Computing machinery and intelligence », Mind, Oxford University Press, vol. 59, no 236,‎ octobre 1950

[2] Florient Perronin Manager of the Facebook Artificial Intelligence Research (FAIR), in « Le magazine de la rédaction L’intelligence artificielle made in France », émission diffusée sur France Culture le 20 mai 2016 http://www.franceculture.fr/emissions/le-magazine-de-la-redaction/l-intelligence-artificielle-made-in-france

[3] http://www.huffingtonpost.fr/2016/06/02/intelligence-artificielle-google-musique-art_n_10254550.html

Impact de la réforme du droit des obligations sur le droit des sociétés (ordonnance du 10.02.2016)

L’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations entre en vigueur d’ici quelques jours (1er octobre 2016).

Elle opère une refonte importante du droit des contrats.

L’attention du praticien sera plus particulièrement attirée sur l’entrée dans le Code civil de la promesse unilatérale et du pacte de préférence, deux figures que l’on retrouve fréquemment dans les pactes d’associés.

Ces derniers bénéficieront d’une sécurité juridique accrue, peut-être davantage d’ailleurs en ce qui concerne la question des promesses unilatérales.

1. L’impossible révocation de la promesse unilatérale : enfin la sérénité !

La promesse unilatérale est désormais définie au 1er alinéa article 1124 du Code civil comme le contrat « le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ».

La définition a le mérite de la clarté. Mais ce n’est pas là que réside l’innovation.

Elle réside en réalité au 2ème et 3ème alinéa de ce même article :

« La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat promis.

Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l’existence est nul ».

Grâce à ces deux alinéas, les praticiens retrouvent le sourire.

En effet, la solution qui est désormais consacrée par le Code civil condamne définitivement la position retenue par la Cour de cassation depuis de (trop) longues année et au terme de laquelle le promettant à la promesse pouvait révoquer sa promesse tant que le bénéficiaire n’avait pas levé l’option.

La solution retenue par la Cour de cassation rendait la promesse unilatérale peu sûre… puisque la « vie » de la promesse, son efficacité même, était subordonnée à la seule volonté du promettant.

Désormais, la révocation de la promesse par le promettant versatile ne sera pas un frein à la formation du contrat promis.

Surtout, le contrat qui viendrait quand même à être conclu en contravention avec la promesse serait frappé de nullité.

A n’en pas douter, ce nouvel article 1124 du Code civil constitue une des innovations remarquables de l’ordonnance du 10 février 2016.

A noter, dernier point, que cette nouvelle règle s’appliquera aux seuls contrats conclus à compter du             1er octobre 2016. Toutefois, certains s’interrogent déjà sur un revirement de jurisprudence de la Cour de cassation et donc, in fine, sur une application de cette nouvelle règle aux promesses conclues antérieurement à cette date.

2. La consolidation du régime juridique du pacte de préférence : l’efficacité en clair-obscur !

Le Code civil définit désormais le pacte de préférence à l’article 1123 du Code civil comme « le contrat par lequel une partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter ».

L’apport de la réforme, au-delà d’avoir introduit une définition du mécanisme dans le Code civil, réside principalement dans les sanctions en cas de violation du pacte.

En effet, l’alinéa 2 du même article dispose que « lorsqu’un contrat est conclu avec un tiers en violation d’un pacte de préférence, le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi. Lorsque le tiers connaissait l’existence du pacte et l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu ».

Dès lors, deux hypothèses s’offrent à nous en cas de violation du pacte :

  • Dans l’hypothèse où le tiers est de bonne foi (ignorant l’existence du contrat), le bénéficiaire pourra seulement obtenir des dommages et intérêts,
  • Dans l’hypothèse où le tiers est de mauvaise foi, le bénéficiaire pourra obtenir à la fois des dommages et intérêts mais, et surtout, agir en nullité et demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu,

Les solutions désormais consacrées par le Code civil ne sont pas nouvelles puisque retenues par la Cour de cassation depuis de nombreuses années.

En pratique, la situation du bénéficiaire évincé confronté à un tiers de mauvaise foi ne sera pas forcément plus confortable qu’auparavant : le texte de l’article 1123 (comme la jurisprudence antérieurement) impose au bénéficiaire du pacte d’apporter la preuve de ce que le tiers avait connaissance (i) de l’existence du pacte et, surtout, que (ii) ce tiers était au courant de « l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir ».

La preuve peut s’avérer ardue…

En réalité, concernant le pacte de préférence, l’innovation la plus intéressante réside dans l’instauration d’une action interrogatoire destinée à mettre fin aux situations de non-dit et d’incertitude.

Désormais, le « tiers peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer dans un délai qu’il fixe et qui doit être raisonnable, l’existence d’un pacte de préférence et s’il entend s’en prévaloir ».

A défaut de réponse du bénéficiaire dans ce délai raisonnable, le tiers en question peut conclure en toute sécurité le contrat objet du pacte de préférence. En effet, le silence gardé par le bénéficiaire l’empêchera plus tard de solliciter la nullité du contrat ou sa substitution au contrat conclu.

 

Droit des contrats et internet

Le droit de l’internet soulève de nombreuses interrogations dans des domaines variés.

Quelques exemples:

– compétence territoriale: Cour de justice des communautés européennes (CJUE, 3 octobre 2013): un auteur s’est aperçu que ses chansons avaient été reproduites par une société autrichienne, puis commercialisé par une société britannique par l’intermédiaire de sites accessibles en France. La cour de justice a considéré que le Tribunal de grande Instance de Toulouse (lieu du domicile de l’auteur) est compétent dans la mesure où le site internet est accessible dans le ressort de la juridiction saisie.

A noter que le juge français n’est compétent que pour connaître du préjudice causé en France.

– droit du travail : la cour d’appel de Bordeaux estime qu’une heure passée -sur trente hebdomadaires- à utiliser à des fins privées l’outil informatique mis à disposition par l’employeur n’est pas de nature à jusitifier un licenciement, même si le règlement intérieur interdit tout usage de ce type (CA Bordeaux, 15 janvier 2013);

– droit des contrats: Il ne faut pas tout assimiler à un contrat sous forme électronique ! un contrat portant sur un abonnement téléphonique et d’échanges de données mobiles établi sur support papier n’est pas un contrat soumis aux dispositions des articles 1369-1 et suivants du code civil qui vise les contrats établis sous forme électronique et non les contrats ayant un rapport avec le web.