Flash sur l’actualité sociale

Actualité n°1 – Droit au report des congés payés lorsqu’un arrêt pour maladie survient durant cette période

  •  La question posée à la Cour de cassation :

Un salarié en arrêt maladie pendant ses vacances a-t-il droit au report des congés payés ?

  • La réponse de la Cour de cassation :

    OUI

Cass. Soc 10 septembre 2025 (n° 23-22.732)

Le salarié, en arrêt maladie pendant ses vacances, peut désormais bénéficier d’un report de ses congés payés dès lors qu’il notifie son arrêt maladie à son employeur.

  • Le raisonnement de la Cour de cassation :

Il s’agit d’un revirement de la Cour de cassation basé sur le droit de l’Union Européenne, lequel consacre le principe du droit au report sur la base de l’article 7, paragraphe 1, de la Directive 2003/88/CE. Une évolution du droit français était attendue de longue date sur ce point.

La Cour de cassation distingue ainsi clairement deux droits n’ayant pas le même objet :

  1. Le congé payé : garantie du repos/ loisirs du salarié ;
  2. Le congé maladie : garantie du rétablissement/soin du salarié en cas de problème de santé.
  • Et en pratique :

Pour bénéficier d’un tel report, le salarié devra notifier son arrêt de travail à l’employeur ; les conditions de cette notification (forme / délais) ne sont pas fixées. Pour des raisons évidentes de preuve, le salarié devra privilégier le courrier LRAR ou le mail avec accusé de lecture.

Concernant les conditions du report, on peut supposer qu’il faudra se référer aux règles de report prévues par le code du travail (article L3141-19-1 et suivants).

Des questions pourraient néanmoins se poser en termes de prescription ou de traitement en paie. La question peut aussi se poser concernant la 5e semaine congés payés, puisque le Droit Européen n’en consacre que 4.

  • Pour aller plus loin :

Cet arrêt s’inscrit dans une série de décisions importantes de la Cour de cassation sur les congés payés :

  1. Les arrêts pour maladie non professionnelle ouvrent droit à congés payés (Soc. 13/9/2023, n°22-17.340) ;
  2. Les arrêts pour accident du travail et maladie professionnelle ouvrent droit à congés payés sans limite d’un an (Soc. 13/9/2023, n°22-17.638).

Actualité n°2 – Lorsque le temps de travail est décompté à la semaine, les congés payés sont désormais pris en compte pour le seuil de déclenchement des heures supplémentaires 

  • La question posée à la Cour de cassation :

Le calcul du seuil de déclenchement des heures supplémentaires doit-il prendre en compte les jours de congé payé ?

  • La réponse de la Cour de cassation :

    OUI

Cass. Soc 10 septembre 2025 (n° 23-14.455)

Les périodes de congés payés doivent être incluses dans l’assiette de calcul hebdomadaire des heures supplémentaires.
  • Le raisonnement de la Cour de cassation :

Rappel : Les heures supplémentaires sont toutes celles effectuées au-delà de la durée légale de travail effectif de 35 heures par semaine dans le cadre d’un décompte hebdomadaire du temps de travail d’un salarié

Néanmoins, le droit français pose le principe du calcul du seuil de déclenchement des heures supplémentaires en ne tenant compte que du travail effectif du salarié. Jusqu’à présent, les jours de congés payés étaient exclus.

La CJUE a cependant estimé, en 2022, qu’une telle règle produisait un effet dissuasif sur la prise du congé annuel et était donc contraire à la directive 2003/88/CE et à l’article 31 § 2 de la Charte des droits fondamentaux.

Ainsi, le calcul des heures supplémentaires excluant les congés payés ou les congés maladie n’est pas conforme au droit européen.

La Cour de cassation s’est alignée sur le droit européen : le salarié, soumis à un décompte hebdomadaire de sa durée de travail, peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires sur la semaine au cours de laquelle il a posé des congés payés.

  • Et en pratique :
Avant Arrêt de la Cour de cassation du 10/09/2025
Lundi Congé = 0 heure effective Congé = 7 heures effectives
Mardi 7 7
Mercredi 7 7
Jeudi 8 8
vendredi 8 8
Temps de travail effectif 30 37
Temps rémunéré 37 37
Nombre d’heures majorées 0 2

 

Vous avez une problématique à ce sujet ? Toute l’équipe du pôle social du cabinet est à votre écoute.

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Anouck Suberbielle – Avocate associée – Spécialiste Droit du Travail – DU de Droit social des entreprises en difficulté

Mathilde Benoit – Avocate

Léa Brossay – Juriste apprentie

ACTU’Sociale – Preuve des heures supplémentaires

La Cour de cassation précise la preuve des heures supplémentaires. Focus sur l’arrêt. Cass. soc. 27/01/2021 n°17-31.046

 « En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations, d’une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre, d’autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, la cour d’appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé. »

  • Preuve incombant au salarié ?
  • Que peut faire l’employeur ?
Slides - Preuve heures de travail supplémentaires Kacertis Avocats

ACTUALITES DROIT SOCIAL

Les jurisprudences récentes en droit du travail et de la sécurité sociale sous forme d’infographie. En quelques lignes, les derniers arrêts marquants sont décryptés pour vous (forfait annuel en jours, CSE, procédure vexatoire, contrôle URSSAF…).

 

Anouck SUBERBIELLE

Avocate Associée 

Décidément les clauses de non-concurrence n’ont pas fini de faire parler d’elles !

L’arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 20 mai 2015 en est une nouvelle illustration.

Insérée dans un contrat de travail, une clause de non-concurrence n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise et limitée dans le temps et dans l’espace, étant ici précisé que ces conditions sont examinées à l’aune de l’emploi occupé par le salarié.

Depuis 2002, la validité d’une telle clause est en outre subordonnée à l’existence d’une contrepartie financière au profit du salarié.

Les praticiens s’attachent donc depuis cette date à vérifier que le montant de la contrepartie est suffisamment important pour que la clause soit pleinement efficace (en effet la contrepartie dérisoire s’assimile à une absence de contrepartie).

Si la clause de non-concurrence ne respecte pas les conditions cumulatives énumérées ci-dessus, la nullité de la clause pourra être demandée par le salarié.

Insérée dans un acte de cession de titres, la clause de non-concurrence semble pouvoir s’affranchir de la contrepartie financière.

Mais depuis quelques années, le doute est parfois permis.

Et l’arrêt de la Cour d’appel de Paris le laissera persister…

En 2011, la Cour de cassation avait suscité quelques craintes en jugeant « que lorsqu’une clause de non-concurrence a pour effet d’entraver la liberté de se rétablir d’un salarié actionnaire ou associé de la société qui l’emploie, la clause de non-concurrence signée par lui, n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation de verser à ce dernier une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives » (http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000023742934&fastReqId=70101413&fastPos=1).

Ainsi, à la lecture de cet arrêt de 2011, la contrepartie financière faisait son entrée dans le champ des cessions de droits sociaux.

Toutefois, à la suite d’un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 8 octobre 2013, une explication à la solution retenue en 2011 faisait jour.

En réalité, il fallait examiner si l’associé, en plus de cette 1ère qualité, a (ou non) la qualité de salarié.

Deux situations sont alors à distinguer :

  • Soit l’associé cumule cette qualité avec celle de salarié de la société au moment où la clause de non-concurrence est souscrite et auquel cas une contrepartie financière devra être stipulée ;
  • Soit l’associé n’a que cette seule qualité et auquel cas la clause de non-concurrence n’a pas à comporter de contrepartie financière.

Les choses semblaient donc plutôt claires.

Toutefois, l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 20 mai 2015 semble revenir sur cette solution en imposant une « obligation pour la société de verser à ce dernier [le cédant] une contrepartie financière » alors-même qu’il n’était pas salarié.

Il faudra donc surveiller le prochain arrêt de la Cour de cassation rendu en la matière pour déterminer si l’arrêt de la Cour d’appel de Paris était une fausse alerte ou annonçait en réalité la nouvelle position de la Cour de cassation.