Attention à la rédaction des offres de renouvellement en matière de baux commerciaux : le risque accru d’une requalification par le juge en « congé refus de renouvellement ».
Dans un arrêt important, en date du 11 janvier 2024[1],la Cour de Cassation juge qu’une offre de renouvellement de bail commercial proposant des clauses et conditions différentes de celles du bail expiré, hors le prix, doit être considérée comme un refus de renouvellement, ouvrant ainsi droit à une indemnité d’éviction pour le locataire.
Pour mémoire, le renouvellement d’un contrat est défini comme la création d’un nouveau contrat dont les clauses et conditions sont identiques à celles du contrat précédent.[2] La définition est similaire en matière de bail commercial, à l’exception de la durée du bail qui est fixée à neuf ans, sauf accord contraire des parties.[3]
A cet égard, la jurisprudence est constante et indique que le renouvellement d’un bail commercial doit s’opérer aux mêmes conditions que celles du bail expiré[4], à l’exception de la fixation du prix du loyer par le juge.
⇒ Attention : le bail commercial renouvelé après délivrance d’un congé est considéré comme un nouveau bail par la jurisprudence, qui considère que le précédent bail cesse par l’effet du congé.[5]
En l’espèce, la Haute Juridiction requalifie le congé, avec offre de renouvellement, en refus de renouvellement[6], le bailleur ayant manifesté son intention de ne pas conserver les clauses et conditions du bail expiré.
En effet, il s’agit de s’attacher à la volonté de l’auteur du congé : en modifiant les conditions de renouvellement, en l’espèce la contenance des lieux loués et les obligations d’entretien du locataire, la Cour estime que ces modifications étaient incompatibles avec le renouvellement du bail.
Dès lors, toute modification des clauses ou conditions dans une offre de renouvellement, en dehors du prix, équivaut à un refus de renouvellement, donnant droit au locataire à une indemnité d’éviction.
→ Quels sont les impacts d’une telle décision ?
- Les bailleurs doivent être prudents et s’assurer de ne pas exprimer de volonté contradictoire. Ainsi toute offre de renouvellement devra respecter les clauses et conditions du bail expiré pour éviter le paiement d’une indemnité d’éviction ce, à défaut d’accord amiable entre les parties ;
- Les locataires, quant à eux, bénéficient d’une protection accrue, leur permettant de contester un renouvellement qui modifierait les conditions du bail initial.
⇒ Attention toutefois, la qualification pour le locataire n’est pas non plus neutre. En effet, en cas de congé caractérisant un refus de renouvellement, le locataire devra agir dans un délai de deux ans pour solliciter notamment, l’indemnité d’éviction, à défaut il perdra tous ses droits.
Le cabinet KACERTIS AVOCATS reste à votre disposition.
Morgane LE LUHERNE & Jérémy SIMON
[1] Cass, Civ. 3e, 11 janv. 2024, FS-B, n° 22-20.872
[2] Article 1214 du Code civil
[3] Article L. 145-12 du Code de commerce
[4] Cass, Civ. 3e, 17 mai 2006, no 04-18.330
[5] Cass, Ass. Plén., 7 mai 2004, no 02-13.225
[6] Au visa de l’article 12 du Code de procédure civile